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Transition écologique : l’Afrique au centre du jeu des industries extractives

La transition écologique redéfinit les priorités économiques mondiales et consacre l’Afrique comme un acteur incontournable des industries extractives. Avec un sous-sol riche en minerais critiques, le continent joue un rôle central dans l’approvisionnement en matières premières indispensables aux technologies vertes, des batteries électriques aux énergies renouvelables. Mais cette position stratégique pose des défis majeurs : tirer parti de cette richesse tout en répondant aux impératifs économiques, sociaux et environnementaux.

Des ressources stratégiques au service d’une économie verte

L’Afrique concentre une part importante des minerais critiques nécessaires à la transition énergétique. Selon l’Agence française de développement (AFD), le continent possède 50 % des réserves mondiales de cobalt, utilisé principalement dans les batteries lithium-ion. La République démocratique du Congo (RDC) en produit 70 %, ce qui fait du pays un acteur incontournable. Parallèlement, la Zambie et la RDC dominent la "Copperbelt", région riche en cuivre, métal clé pour les infrastructures électriques et solaires.

Au sud du continent, l’Afrique du Sud dispose de vastes réserves de platine et d’uranium, essentiels aux technologies d’énergie propre. Ces ressources positionnent l’Afrique comme un pilier de l’économie verte mondiale. Pourtant, leur exploitation soulève des questions sur la durabilité des pratiques actuelles et les retombées pour les populations locales.

Une exploitation minière encore sous-optimisée

Malgré l’abondance de ses ressources, l’Afrique peine à maximiser les bénéfices économiques de l’exploitation minière. Les recettes fiscales issues du secteur sont bien en deçà de leur potentiel. Un rapport de l’AFD souligne que les revenus générés restent faibles, notamment à cause d’accords déséquilibrés avec les multinationales et d’une fiscalité minière insuffisamment adaptée.

En RDC, la récente hausse de la redevance minière pour les minerais stratégiques, portée à 10 %, illustre une tentative de rééquilibrage. Mais les États africains font face à des multinationales comme Glencore ou Anglo American, dont la maîtrise des leviers économiques réduit les marges de manœuvre des gouvernements. À cela s’ajoutent des pratiques d’évasion fiscale et des clauses de stabilisation qui figent les politiques fiscales sur plusieurs décennies.

Un coût environnemental et social élevé

L’extraction minière en Afrique est souvent synonyme de pollutions majeures. En RDC, les sites de cobalt contaminent sols et nappes phréatiques, affectant directement les populations locales. Les substances toxiques, comme le cyanure utilisé dans l’extraction aurifère, posent de graves problèmes de santé publique et de durabilité environnementale.

Des projets innovants émergent néanmoins. En Afrique du Sud, la "Platinum Valley" s’efforce de conjuguer économie circulaire et transformation locale des minerais. Ce modèle ambitieux, soutenu par des investissements publics et privés, pourrait inspirer d’autres régions du continent. Mais pour que ces initiatives se multiplient, des normes environnementales plus strictes et des mécanismes de contrôle efficaces doivent être mis en place.

Le défi de la transformation locale

L’une des clés pour l’Afrique réside dans la transformation locale des minerais. Exporter des ressources brutes limite les retombées économiques, alors que leur traitement sur place pourrait multiplier les revenus et créer des emplois. C’est l’objectif de nombreux projets de zones économiques spéciales (ZES), comme celle développée en RDC pour le raffinage du cobalt.

Cependant, les infrastructures restent un obstacle majeur. La Zambie, par exemple, subit de fréquentes coupures d’électricité qui ralentissent les ambitions industrielles. Le manque de routes et de réseaux ferroviaires adaptés complique également l’acheminement des matières premières vers les centres de transformation.

Une opportunité à saisir pour l’Afrique

Les perspectives offertes par la transition écologique sont immenses. Avec des politiques publiques fortes et une coopération internationale bien orientée, l’Afrique pourrait devenir un leader mondial de l’économie verte. Des forums comme l’Indaba Forum, en Afrique du Sud, sont essentiels pour repenser les mécanismes de collaboration entre États, multinationales et organisations internationales.

Mais pour que le continent transforme cette opportunité en succès durable, il devra relever des défis complexes : renforcer la gouvernance, lutter contre la corruption, investir dans les infrastructures et intégrer les impératifs écologiques dans chaque étape de l’exploitation minière.

En s’imposant comme un acteur central des technologies vertes, l’Afrique ne répondrait pas seulement aux besoins mondiaux. Elle se donnerait également les moyens de bâtir une industrie extractive plus équitable et durable, bénéfique à ses populations et à son développement économique.

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