Économie


ÉconomieRDC

Tourisme en RDC : un secteur sous-exploité

Le ministère du Tourisme de la République démocratique du Congo (RDC) a récemment lancé une nouvelle campagne de promotion baptisée "Explorez la RDC, cœur de l'Afrique", visant à mettre en lumière les richesses naturelles et culturelles du pays. Une vidéo promotionnelle diffusée sur les réseaux sociaux présente des paysages époustouflants, des forêts luxuriantes, des volcans actifs et une faune exceptionnelle, dans le but d'attirer les touristes et de redorer l’image du pays.

Cette initiative, relayée notamment par un tweet du journaliste Benjamin Mkapa, témoigne de la volonté du gouvernement de repositionner la RDC comme une destination touristique de choix​. Cependant, la campagne "Explorez la RDC, cœur de l'Afrique" a suscité de nombreuses interrogations. Pour de nombreux observateurs, cette promotion seule ne peut suffire à surmonter les faiblesses structurelles et les défis majeurs auxquels le secteur touristique est confronté.

Infrastructures et accès aux financements

Selon le rapport 2023 de la Banque Africaine de Développement (BAD), la RDC dispose d’un réseau routier de 152 000 km, dont une faible portion est praticable, rendant difficile l’accès aux nombreux sites touristiques du pays. Le Plan Directeur National Intégré des Transports et son Programme Prioritaire 2021-2025 soulignent l’importance d’impliquer le secteur privé pour pallier le déficit d’infrastructures et renforcer la connectivité à travers le territoire​.

Cependant, le financement du secteur touristique demeure un problème majeur. Actuellement, la RDC ne mobilise qu’un total de 495,1 millions d'USD de financements climatiques, dont seulement 3% proviennent du secteur privé​. Cette mobilisation limitée des ressources financières complique les investissements nécessaires au développement des infrastructures touristiques, freinant ainsi le potentiel économique que ce secteur pourrait apporter.

Faiblesse de la coordination intersectorielle

Le secteur touristique en RDC souffre également d’un manque de coordination intersectorielle. Des domaines tels que l’environnement, la culture, les transports et les infrastructures devraient collaborer pour promouvoir un tourisme durable et développer une vision stratégique commune. Cependant, l'absence de synergie entre les ministères concernés et les faiblesses institutionnelles empêchent la mise en œuvre de projets touristiques cohérents.

Le rapport de la BAD souligne l’importance du rôle du ministère de l’Environnement dans la mobilisation des ressources et la formation des compétences nécessaires au développement du tourisme vert. Pourtant, cette mobilisation reste insuffisante, en raison du manque de coordination et d’une vision stratégique claire​.

Dépendance aux financements publics

La majeure partie des financements pour le développement du secteur touristique en RDC provient de sources publiques. En 2022, le gouvernement congolais a mobilisé 480,8 millions d'USD en financements publics, tandis que le secteur privé n'a contribué qu'à hauteur de 14,3 millions d’USD, soit seulement 3% du total​. Cette dépendance vis-à-vis des fonds publics souligne un manque de participation du secteur privé, pourtant crucial pour stimuler l’industrie touristique et encourager une croissance durable.

Enjeux économiques et sociaux

L’exploitation du potentiel touristique de la RDC pourrait entraîner d’importantes retombées économiques et sociales. Outre la création d'emplois, le tourisme durable pourrait contribuer à la préservation de l’environnement et à la valorisation des cultures locales. Cependant, en l'état actuel, le secteur est freiné par des faiblesses structurelles, un manque de ressources et des infrastructures inadéquates.

La RDC, qui est engagée dans la lutte contre le changement climatique, a récemment mis en place des mécanismes de financement vert. Néanmoins, la mobilisation des fonds reste difficile, et la part du financement privé dans ce secteur demeure marginale. Le pays doit surmonter de nombreux défis pour intégrer le secteur privé et encourager des investissements durables, notamment dans le domaine touristique​.

Un secteur à fort potentiel mais fragilisé

Malgré les vastes richesses naturelles et la diversité de ses paysages, la RDC n’a pas encore su s’imposer comme une destination touristique majeure. La récente campagne de promotion "Explorez la RDC, cœur de l'Afrique" illustre les efforts entrepris pour changer la perception du pays. Toutefois, entre les contraintes financières, les infrastructures défaillantes, le manque de coordination stratégique et la faiblesse de la participation du secteur privé, le chemin vers un développement touristique durable en RDC reste parsemé d'obstacles.

Oeil d'Afrique



Économie