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Interview : Marien Fauney Ngombé, fondateur de So’Art

Sur le plan culturel, le Congo est alité

Marien Fauney Ngombé est fondateur de So’Art Brand, la société qui gère les différentes rencontres culturelles qui mettent à l’honneur des artistes africains (So’Art live, So’Art Book, So’Art café …). Celui qui a fait sa carrière en tant Responsable administratif et financier dans différents cabinets d’avocats d’affaires parisiens appelle de tous ses vœux « les états généraux de la culture » au Congo-Brazzaville, son pays d’origine.

 

Oeildafrique: Bonjour Marien, présentez-vous à nos lecteurs et dites-nous d’où tenez-vous cette passion pour la culture

 

Marien Fauney NGOMBÉ: Je me prénomme Marien, je suis né au Congo et je réside actuellement en Ile-de-France. Je suis Responsable administratif et financier de profession et en marge de ma vie professionnelle je suis un passionné de Culture. Et depuis ma passion ne cesse de prendre de plus en plus de place dans ma vie. Ma passion pour la culture, je la tiens de ma famille. Je suis né dans un environnement où tout ou presque était observé à travers un prisme artistique. Mon père a été producteur de musique et éditeur également. Je pense que les gènes sont également responsables de cette inclination pour l’Art. Mes parents et ma fratrie sont tous de grands férus d’art, particulièrement de musique.

 

Certains disent que vous êtes un homme-orchestre en fonction du nombre de choses que vous organisez. Pouvez-vous nous citer toutes les initiatives dans lesquelles vous êtes engagé ? de So’Art au Club Lenda ?

 

Alors vu de l’extérieur ça peut paraitre compliqué mais en fait les choses sont faites les unes après les autres. J’ai l’impression de partir toujours sur de nouveaux projets. Mais pour dire vrai le projet est unique : essayer de faire quelque chose de conséquent et utile pour les jeunes soeurs et frères qui nous observent et nous rappelle notre devoir de transmission.

J’ai eu la chance de rencontrer des amis encore plus passionnés encore que moi. C’est grâce à cette volonté et à l’altruisme de tous que So’Art existe depuis bientôt trois ans. Il s’agissait d’une rencontre culturelle et depuis c’est également une rubrique littéraire sur Africa numéro 1 et nous développons So’Art Music avec notre première co-production avec l’album de l’artiste Doudou Copa. C’est un acte militant que de faire connaitre à tous notre richesse culturelle. L’essor de notre continent passera aussi par ce biais.

Non seulement l’industrie culturelle peut être créatrice de richesse mais au-delà de l’aspect pécuniaire, elle est à l’origine du rayonnement d’un Etat. Elle accompagne l’essor économique. Observez l’essor des USA et plus près de nous dans le temps, la Chine. L’expansion économie et culturelle sont siamoises. La transition est trouvée pour parler du club de réflexion que je préside, le Club Lenda dont les membres fondateurs sont à l’origine le Congolais Arian Samba, le sénégalais Alioune Cissey et moi-même. Nous organisons des rencontres et produisons des écrits sur des sujets socio-économiques qui touchent l’Afrique. Le club a pour ambition de créer des synergies entre les talents du continent.

 

Nous savons que le club Lenda a organisé une conférence sur les enjeux économiques et culturels du panafricanismes et vous avez réuni près de 200 personnes avec une grande couverture médiatique. Le choix de ce thème est-il anodin ? Et à quand le retour sur le continent ?

 

Oui être panafricain selon mon entendement c’est un pré-requis. L’idée c’est porter haut l’idée de la souveraineté du continent. Faire par nous-mêmes et ne pas souffrir du regard que porte l’Occident ou l’Orient sur notre processus d’évolution et d’acquisition de nos substrats de pensées. Penser par nous-mêmes et avec ambition.

Un continent de 54 pays, avec 3000 langues, une croisssance économique de 5% en moyenne depuis plus de 10 ans, avec plus de la moitié de la population de moins de 18 ans. Un institut a déclaré que l’Afrique subsaharienne était la zone geographique la plus optimiste du globe. Croyez moi tout ceci constitue un terreau fertile pour voir les choses en grand. Nous reviendrons c’est certain sur le continent et très prochainement. Ce sera au Congo ou en Côte d’Ivoire et j’espère que vous en parlerez dans les colonnes de votre journal.

 

Quel état des lieux faites vous de la Culture en Afrique et particulièrement au Congo ?

 

Je vais vous répondre sans langue de bois et je vais être chauvin à dessein. L'Afrique c’est 54 pays et il n y a pas de diagnostic homogène d’un pays à l’autre. Concernant le Congo mon avis est clair et je vais essayer de l’étayer brièvement. Sur le plan culturel, le Congo est alité mais n’est pas en soins palliatifs. Je vous prie de voir dans ma formule une forte dose d’espoir. Parlons du Livre par exemple. Nous sortons du dernier salon du livre de Paris en date. J’ai vu de nombreux auteurs regretter le grand pavillon « Bassin du Congo ». C’était le plus grand pavillon du salon en son temps. Certains en parlent comme d’une réussite. Comme si la taille du pavillon témoignait de la grandeur de la littérature congolaise. Je suis désolé tant qu’il n y a pas de réelle politique du livre au Congo, ce genre de pavillon acquis à des sommes astronomiques ne sert qu’à enrichir les organisateurs. 

Le rayonnement de notre littérature ne se fera pas uniquement grâce à trois ou quatre auteurs qui auraient réussi a acquérir une notoriété en France.

Il aurait fallu encourager et soutenir d’ éventuels éditeurs nationaux par exemple. Il faudrait créer des interactions avec des auteurs d’autres pays africains. De nombreuses idées me viennent en vrac. Je pense à des résidences d’écritures qui peuvent être impulsées par des organes soutenus par l’état. Il faut une quête d’excellence en tout. L’idée n’est pas de publier plus d’auteurs mais aider à faire émerger les plus belles plumes et les soutenir. Je pense à des concours pour l’émulation. Je pense à des fonds dédiés co-financés par le public et le privé. Il faudrait absolument se servir de deux leviers : le système éducatif et les médias. La culture doit entrer dans ces deux champs pour irriguer la société. Un salon organisé au Congo aurait plus de sens et d’impact pour l’essor du Livre. Autre chose importante, la voix de l’actuelle ministre de la Culture est inaudible. Je m’explique, je ne dis pas qu’il n’a pas de vision ni de projection mais il doit prendre la parole faire de la pédagogie sur le sujet. Et ne me dites pas que c’est une question de moyens. Chacun incarne sa fonction et pas l’inverse. L’exemple du Livre est hautement symbolique. Il en va de même pour les autres formes d’expressions artistiques. Il faut penser, planifier et mettre les choses en route. Je ne doute pas des initiatives individuelles ça et là mais nous n’y sommes pas du tout pour l’instant.

 

Quels sont vos prochains événements ? Avez-vous des projets à annoncer ?

 

So’Art organise la sortie officielle de l’album de Doudou Copa « Loin des barreaux » ce 6 avril à 17h au Vendome Club à Paris. Un showcase et une séance de dédicaces sont prévus. Ensuite avec l’un de nos meilleurs réalisateurs Glad Amog Lemra, So’Art Ciné organisera prochainement une projection de son court-metrage « Silence » suivi d’un débat. Mi-Avril So’Art est partenaire d’un festival à Bouaké avec au menu de la danse, de l’art culinaire et de la musique pour célébrer l’Afrique. En mai, le club lenda prépare de belles rencontres et à titre personnel j’aurai peut-être l’occasion de revenir sur mon actualité mais allons y pas à pas. Comme dit l’expression « Qui va piano va sano ».

 

Votre dernier mot ?

 

Oui pour finir j’exhorte les acteurs culturels congolais à penser aux Etats généraux de la Culture. Il faut repenser les modèles économiques du business de la culture, revoir l’arsenal législatif et proposer une vraie vision pour la politique culturelle du Congo.

 

© OEIL D'AFRIQUE 

 



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