Politique


Afrique

« Les femmes noires savent que le défrisage est dangereux, mais la pression est trop forte »

Aline Tacite, 43 ans, est une précurseuse en France de la coiffure naturelle pour les femmes noires et métissées. Une tendance autant capillaire qu’identitaire. D’après une étude Ipsos sur les femmes africaines, 68 % des Kenyanes préfèrent les coiffures naturelles, contre seulement 3 % des Ivoiriennes et 4 % des Sénégalaises. La question divise aussi les afro-descendantes. Victime d’une importante chute de cheveux occasionnée par des défrisages répétitifs, cette ancienne assistante de direction trilingue dans un cabinet d’avocats international a découvert aux Etats-Unis le natural hair movement, ou « nappy », qui invite les femmes noires à abandonner les altérations chimiques pour se réapproprier leur véritable texture. En 2001, Aline Tacite lance la première journée de débats et ateliers autour de la coiffure noire, puis en 2005 le salon Boucles d’Ebène devenu un rendez-vous incontournable pour les communautés noires. Sa 6édition se tient à la Cité des sciences et de l’industrie les 27 et 28 mai. Un événement consacré à l’estime de soi.

Les femmes noires ont souvent une histoire complexe avec leur chevelure. Quelle est la vôtre ?

Je suis née à Paris de parents guadeloupéens. Enfant, je me souviens de moments douloureux quand ma maman me tressait et, à 7 ans, j’ai pris conscience de ma différence le jour où on m’a traitée de « sale grosse vache noire » à l’école. J’ai intériorisé cette différence comme un problème qu’il fallait corriger en grandissant. Je me rappelle de crises de larmes :« Maman, dis-moi que quand je serai grande, je serai blanche avec des cheveux lisses. » C’était le seul moyen d’accéder aux canons de beauté de la société française. Mal dans ma peau, j’ai commencé à me défriser les cheveux à l’adolescence. A force de brûlures au cuir chevelu et de chutes de cheveux, je n’en avais plus. Ma meilleure amie blonde aux yeux bleus a explosé de rire nerveusement en me découvrant. Catastrophée, je me suis interrogée sur ce mal-être que je n’arrivais pas à identifier. Pourquoi est-ce que je faisais ça ? Pourquoi chercher à être quelqu’un que je ne serai jamais ?

Afficher des cheveux naturels est devenu un moyen de faire reconnaître votre identité ?

Depuis que nous avons créé Boucles d’ébène avec ma sœur Marina, le mouvement du retour au naturel s’est enraciné, dans la lignée du retour au bio, de l’acceptation de nos rondeurs… Mais je n’aime pas l’étiquette « nappy », contraction de« nap », qui désigne de façon péjorative la petite frisure mal organisée, et « happy » pour le remasteriser de façon positive. C’est stigmatisant.

Lire la suite de l’interview 



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« Les femmes noires savent que le défrisage est dangereux, mais la pression est trop forte »

Aline Tacite, 43 ans, est une précurseuse en France de la coiffure naturelle pour les femmes noires et métissées. Une tendance autant capillaire qu’identitaire. D’après une étude Ipsos sur les femmes africaines, 68 % des Kenyanes préfèrent les coiffures naturelles, contre seulement 3 % des Ivoiriennes et 4 % des Sénégalaises. La question divise aussi les afro-descendantes. Victime d’une importante chute de cheveux occasionnée par des défrisages répétitifs, cette ancienne assistante de direction trilingue dans un cabinet d’avocats international a découvert aux Etats-Unis le natural hair movement, ou « nappy », qui invite les femmes noires à abandonner les altérations chimiques pour se réapproprier leur véritable texture. En 2001, Aline Tacite lance la première journée de débats et ateliers autour de la coiffure noire, puis en 2005 le salon Boucles d’Ebène devenu un rendez-vous incontournable pour les communautés noires. Sa 6édition se tient à la Cité des sciences et de l’industrie les 27 et 28 mai. Un événement consacré à l’estime de soi.

Les femmes noires ont souvent une histoire complexe avec leur chevelure. Quelle est la vôtre ?

Je suis née à Paris de parents guadeloupéens. Enfant, je me souviens de moments douloureux quand ma maman me tressait et, à 7 ans, j’ai pris conscience de ma différence le jour où on m’a traitée de « sale grosse vache noire » à l’école. J’ai intériorisé cette différence comme un problème qu’il fallait corriger en grandissant. Je me rappelle de crises de larmes :« Maman, dis-moi que quand je serai grande, je serai blanche avec des cheveux lisses. » C’était le seul moyen d’accéder aux canons de beauté de la société française. Mal dans ma peau, j’ai commencé à me défriser les cheveux à l’adolescence. A force de brûlures au cuir chevelu et de chutes de cheveux, je n’en avais plus. Ma meilleure amie blonde aux yeux bleus a explosé de rire nerveusement en me découvrant. Catastrophée, je me suis interrogée sur ce mal-être que je n’arrivais pas à identifier. Pourquoi est-ce que je faisais ça ? Pourquoi chercher à être quelqu’un que je ne serai jamais ?

Afficher des cheveux naturels est devenu un moyen de faire reconnaître votre identité ?

Depuis que nous avons créé Boucles d’ébène avec ma sœur Marina, le mouvement du retour au naturel s’est enraciné, dans la lignée du retour au bio, de l’acceptation de nos rondeurs… Mais je n’aime pas l’étiquette « nappy », contraction de« nap », qui désigne de façon péjorative la petite frisure mal organisée, et « happy » pour le remasteriser de façon positive. C’est stigmatisant.

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