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Trump coupe les financements à la BAD : quel impact pour l’Afrique ?
À la veille de l’Assemblée annuelle de la Banque africaine de développement (BAD) à Abidjan, le président américain Donald Trump a officialisé son intention de supprimer, d’ici 2026, la contribution américaine au Fonds africain de développement (FAD), guichet concessionnel de la BAD destiné aux pays les plus pauvres du continent. Cette décision, stratégique autant que symbolique, intervient dans un contexte de révision des priorités budgétaires américaines sous le slogan du repli souverainiste.
Ce retrait anticipé de l’un des principaux bailleurs du FAD – avec près de 500 millions de dollars versés lors du cycle FAD-15 – pourrait déstabiliser la dynamique de financement du développement social dans 37 États africains. Les projets dans les secteurs de la santé, de l’éducation, des infrastructures rurales ou de la sécurité alimentaire sont particulièrement concernés.
Une logique politique aux conséquences mondiales
La suppression envisagée s’inscrit dans une ligne de rupture déjà amorcée sous le premier mandat de Trump, marqué par la réduction de l’aide extérieure, le désengagement de l’OMS et la défiance vis-à-vis des institutions multilatérales. La BAD, bien qu’africaine, n’échappe pas à cette lecture géopolitique de l’aide au développement.
« C’est une remise en question de l’engagement moral et stratégique des États-Unis envers l’Afrique », a réagi un diplomate. À ses yeux, ce retrait n’est pas seulement comptable : il traduit un désintérêt croissant pour les dynamiques africaines, au profit de logiques de compétition avec la Chine, l’Inde ou les puissances du Golfe.
Vers un recentrage africain ?
Privée d’un soutien crucial, la BAD devra réajuster ses ambitions. Cela pourrait se traduire par une augmentation des contributions des membres non-régionaux restants ou, plus difficilement, par une montée en puissance des contributions africaines elles-mêmes. La montée de partenariats Sud-Sud est envisagée, mais leur capacité à compenser un retrait américain reste incertaine.
Certaines initiatives nationales pourraient toutefois préfigurer une réponse locale. En République démocratique du Congo, le Fonds social (FSRDC), restructuré en 2023, s’est fixé pour mission de réduire la dépendance aux financements extérieurs, avec un plan d’action à 650 millions USD centré sur les territoires ruraux.
Un moment charnière pour l’Afrique
L’avenir du FAD, et plus largement de la BAD, dépendra de la capacité collective à rebâtir une solidarité multilatérale crédible. Car au-delà des chiffres, c’est le modèle même de coopération internationale en faveur de l’Afrique qui vacille. Le risque est de voir le continent relégué dans les priorités stratégiques des grandes puissances, au moment même où les besoins sociaux et environnementaux s’intensifient.
Le prochain président de la BAD, dont l’élection est imminente, devra composer avec cette donne nouvelle : une institution affaiblie, un budget incertain, mais une mission plus cruciale que jamais.
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