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Côte d’Ivoire : délestage et pénurie d’eau, un gros frein à l’économie nationale

Depuis quelque temps, la Côte d’Ivoire vit au rythme des coupures intempestives d’électricité et d’eau. Aucun quartier d’Abidjan, aucune ville de l’intérieur ne sont épargnés. Une situation qui agit négativement l'économie nationale. Délestage ou rationnement, les ivoiriens découvrent la vie sans eau et électricité.

Plusieurs communes Abidjanaises sont victimes de cette situation. Dans la commune d’Abobo, une manifestation a été organisée pour dire le ras-le-bol face à face à l'absence d'un service de première nécessité. Dans certains quartiers de Yopougon, la pénurie d’eau est plus criant tant la qualité de ce qu'est fourni, sa qualité laisse à désirer.

Les répercussions de ce délestage perturbe le bon fonctionnement des activités économiques du pays. Le prix de certaines matières a commencé à prendre l’ascenseur. Des entreprises des zones industrielles connaissent déjà un ralentissement de leurs activités et il est à craindre des lendemains critiques si la situation demeure en l’état ou s’empire.

Mourrir à petit feu

C’est le cas du marché d’Abobo où le prix des marchandises même ceux des produits de premières nécessités ont triplement augmenté. Interrogée, Dame Konaté nous donne des explications.

« En faite, tout devient difficile. Il n’y a pas d’eau ni d’électricité. Avant par exemple, nous attendions les camions de vivriers jusqu’à 23 heures voir minuit ou 1 heure du matin. Pour ensuite nous rendre au marché ici à 5 heures afin de pouvoir vendre comme il se doit. Mais maintenant à 20 heures déjà courant est coupé. On ne peut plus aller attendre le camion la nuit, au risque de s'exposer à des agressions possibles. D’ailleurs comment peut-on travailler dans le noir ? Tout cela a bouleversé le bon fonctionnement d'une économie. Il faut se réveiller à 5 heures pour aller à Adjamé où les camions déchargent et revenir au marché ici avec les embouteillages, il est déjà 8 heures ».

Et d’ajouter : « Il faut que le gouvernement pense à nous parce que vivre sans électricité et eau, c’est mourir à petit feu ».

Même son de cloche pour une dizaine de commerçants interrogés. Contrairement aux vendeuses de vivriers, les coiffeurs et coiffeuses estiment sentir plus le poids de cette situation qui les oblige parfois à passer toute une journée sans ouvrir leurs salons.

On ne dit pas délestage mais rationnement

Assis à Angré, un quartier de la commune de Cocody, Yves Konan, la quarantaine révolue partage sa peine avec des amis. Pour lui, la coiffure étant son unique activité, il craint des jours pas du tout rose pour sa petite famille. 

« Voici mon petit salon de coiffure. Cela fait des semaines que l’électricité nous pose des vrais soucis. Les clients ont même peur de se faire coiffer de peur de se retrouver avec une partie de cheveux non-rasés. On nous dit de ne pas dire délestage, mais plutôt rationnement. Au lieu de trouver une solution, on préfère trouver un autre nom à cette situation qui met des milliers de personnes au chômage. Mon salon ne marche même plus depuis cette affaire de rationnement. Comment allons-nous vivre si ça continue ? C’est très difficile. À côté de cela, tu finis ton petit boulot, tu rentres et là encore, c’est catastrophique, il n’y a pas d’eau », a-t-il lancé.

Les explications sur la situation de délestage et de pénurie d’eau que vit le pays, entendues à la chaîne nationale, laissent songeur, et inquiètes. Selon les autorités, l'explication de la situation est simple. C'est le niveau d’eau dans les lacs des barrages hydroélectriques qui est à la base des difficultés d’approvisionnement en électricité que connait le pays.

Les habitants de la commune de Yopougon à la recherche d'eau. Abidjan 15 mais 2021
Les habitants de la commune de Yopougon à la recherche d'eau. Abidjan 15 mais 2021

Plus une goutte d'eau

Dans la commune de Yopougon plusieurs quartiers sont privés d'eau depuis quelques semaines voire même des mois. Plus aucune goutte d'eau ne sort des robinets. Ici et là, nous voyons des femmes avec des bassines d'eau sur la tête pour essayer d'avoir un peu d'eau pour les familles, des hommes, pousser des charrettes d'eau, des camions-citernes des agents des sapeurs-pompiers militaires.

Toute essoufflée avec une bassine d’eau sur la tête la jeune étudiante en ressources humaines et communication, Thérèse Tapé nous parle de leurs souffrances quotidiennes. « C’est comme ça ici et cela depuis un moment. Avant l’eau sortait la nuit. Mais maintenant il n'y a plus rien. Aujourd'hui, je profite de mon temps libre pour aller à la cherche l'eau. Avec la pénurie d'eau, nous subissons l'absence d'électricité. Ce qui joue vraiment sur la connexion internet et donc rend les choses plus pénibles. On espère que cette situation sera maîtrisée».

Au quartier Selmer, l’informaticien Traoré Abdoulaye affirme avoir fermé son cyber-café pour un temps. Cela, de peur de subir des courts-circuits. « J’ai fermé le cyber le temps que les choses aillent pour le mieux parce qu' on a l’impression d’être dans une salle de jeux de lumière. J’ai vraiment peur pour mes appareils donc le mieux c’est de fermer en attendant ».

Les promesses du barrage hydroélectrique

Ainsi va la vie en côte d'Ivoire. Pourtant, lors de l’inauguration du barrage hydroélectrique de Soubré, le plus grand d’Afrique, le discours était très rassurant. La promesse était claire. Plus rien ne sera comme avant et que le pays allait accroître la fourniture de l’électricité aux pays voisins frères.

Fort des barrages hydroélectriques existants et de quelques centrales thermiques, le pays n’a guère envisagé d'explorer d’autres horizons pour venir en complément de ce dont il dispose. L’énergie solaire reste à l’état embryonnaire, alors qu'elle aurait pu être un appoint important au moment où les barrages subissent les aléas climatiques. 

Saliho Abran, Abidjan, Oeil d'Afrique



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