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Harish Jagtani, la fondation qui éclipse son créateur

Appui au gouvernement dans la lutte contre le Covid-19 en 2020, 500 prothèses gratuites offertes en 2021, chirurgie gratuite de la cataracte en 2022, 80 tonnes des produits pour les sinistrés de Kalehe en 2023, on pourrait remonter à 2016, année de sa création, la Fondation Harish Jagtani se tient toujours auprès des Congolais qui sont dans le besoin.

Une œuvre sociale multiforme

On est en février 2024 et les gens se posent légitimement des questions du type « combien d’actions sociales posera HJ cette année ? », « de quelle nature seront-elles ? », « auprès de quelles catégories de personnes ? » ou encore « dans quels coins de la République Démocratique du Congo seront-elles posées ?». Les actions citées plus haut ne sont pourtant que des échantillons pour chaque année alors que HJ Foundation se met régulièrement au diapason des problèmes de la société. L’une de ses plus grandes innovations de ces dernières années par exemple, c’est la clinique mobile qui a vu le jour en 2023.

Objectif : offrir des soins gratuits aux démunis, comme l’affirmait Harish Jagtani : « J'ai vu qu'il y a beaucoup de patients qui n'arrivent pas à avoir des soins médicaux à cause du manque de moyens. C'est comme ça que j'ai monté cette structure-là, pour que ce soit 100% gratuit ». D’une capacité de 300 lits, l’hôpital offre multiples services « Il y a un service de prothèses qui est disponible, poursuit Harish Jagtani. Nous avons le service dialyse. Normalement, ça coûte à peu près 150 dollars américains par séance ; c'est trop cher. Là, ce sera gratuit. On a mis aussi le service ophtalmologie, on va donner des traitements gratuits ».

Dodia est mère d’une jeune fille d’une dizaine d’années. Les deux ont parcouru plus de 450 kilomètres jusqu’à Kinshasa pour bénéficier de ce service. « Nous venons de la province du Kongo-Central, précisément de la ville de Boma. J’avais suivi aux informations que HJ offrait gratuitement des prothèses. C’est comme ça que j’avais amené ma fille. Que les autres parents dont les enfants ont des conditions similaires n’hésitent pas à venir ; je n’ai rien payé ».

La jeune mère qui joue avec sa fille martèle sur l’aspect de gratuité parce qu’elle reconnaît que les moyens financiers sont le principal obstacle pour l’accès aux services médicaux adéquats. Deux ans auparavant, Dorcas, la vingtaine, ressassait les cent pas dans la cour de rééducation au milieu d’autres personnes vivant avec handicap -militaires et civils, qui venaient également de recevoir des prothèses gratuites. Elle semblait miraculée : « Après beaucoup de temps à marcher sur des béquilles, là j’ai maintenant la chance de marcher avec les deux jambes, en piétinant le sol, c’est pour cela que je dis un grand merci à Harish Jagtani Fondation ». Elle admet pourtant, qu’elle n’espérait pas que la solution fût à portée de main : «  J’ai été amputée (d’une jambe, ndlr) suite à un cancer. Lorsque j’ai demandé à ma tante qui vit au Canada de m’envoyer une prothèse, c’est elle qui m’a informé que chez HJ, on distribuait des prothèses gratuitement ». Une réponse à un besoin.

Des interventions spontanées

Lorsque HJ Foundation a été créée en 2016, son promoteur assurait vouloir surtout coordonner une œuvre philanthropique qu’il entreprend toujours en parallèle avec ses affaires. Elle intervient essentiellement dans la santé et l’éducation. Mais il y a, par ailleurs, de nombreuses actions spontanées qui prouvent qu’au-delà de son agenda, la fondation est attentive. « HJ a écouté le cri d’alarme lancé par notre gouverneur de province et que j’ai moi-même relayé en tant qu’administrateur du territoire », affirmait Eric Zawadi, administrateur du territoire de Kalehe, dans le Sud-Kivu qui venait d’être frappé par des inondations qui avaient fait des centaines de victimes.

C’est alors que la fondation s’y était déployée : le promoteur Harish jagtani, une équipe médicale composée d’une dizaine de professionnels ainsi que 20 volontaires qui avaient aidé notamment à déblayer les décombres pour rechercher soit des survivants soit des corps. Tout cela en plus d’une assistance matérielle considérable qui avait marqué les esprits. « Nous venons de recevoir la visite de HJ Fondation qui vient de nous apporter un don de 80 tonnes des médicaments, vivres et non-vivres », témoignait le représentant des sinistrés, Martin Kahundahunda avant d’ajouter « ils viennent de payer les factures pour les mamans qui traînaient dans la maternité au centre de santé de Bushushu faute de moyens. Et ils ont promis de continuer à nous accompagner notamment en équipant le centre de santé pour que les gens reçoivent des soins de qualité ».

A travers tout le pays, la HJ Foundation réalise ce type d’actions ponctuelles. De l’assistance aux nécessiteux, des dons réguliers dans des orphelinats, etc.

Harish Jagtani, la Fondation et l’homme derrière

Pour les plus de 15 millions d’habitants de Kinshasa, HJ évoque un hôpital moderne et une fondation. Dans l’ombre de cet investissement et cette charité se trouve un homme d’affaires et un philanthrope acharné dans le travail et dévoué à la cause des autres. Le quarantenaire indien vit en RDC depuis une vingtaine d’années. « Le Congo m’a tout donné, c’est le moment de redonner », la phrase qu’il répète inlassablement en dit long sur rapport à ce pays qui l’avait vu arriver jeune à une époque où il devait encore composer avec les aléas d’une société et d’une culture tout simplement autres.

Pourtant et malgré son humilité, il ne manque pas de mérite. Aujourd’hui assis sur un empire d’entreprises florissantes, il faut surtout souligner qu’il les a créées les unes après les autres. Avec du flair, il choisit les domaines pour investir et avec le travail il transforme des situations en opportunités. Propriétaire de Serve Air, Harish Jagtani est le leader incontestable du fret aérien dans un pays qui en a particulièrement besoin plus que les autres à cause de l’absence ou du mauvais état des infrastructures de transport. D’après les statistiques internes, la société achemine chaque année environ 2.5 millions de tonnes de biens à travers le pays avec comme principaux clients les agences humanitaires, les commerçants et le gouvernement. Pourtant lorsqu’il acquiert la propriété de la société en 2003, alors Service Air, elle connecte seulement Kinshasa et Lubumbashi. Une année plus tard, il réussit à l’étendre sur 25 destinations. 

En 2023, c’est lui encore qui ressuscite le secteur automobile lorsque sa société Suprême inaugure une usine de montage des véhicules Mercedes à Kinshasa le 10 juin 2023 en présence du président Félix Tshisekedi, une première depuis trente ans qui avait suscité auprès du public une vive euphorie.

L’art de réussir et de faire des envieux

Harish Jagtani est un homme discret ; il préfère travailler que de s’afficher ou d’aller parler de lui-même. Un choix dont il fait les frais car, lorsque le nom de l’homme d’affaires sort dans les médias étrangers (très influents dans le pays), c’est souvent pour prêter la voix à des rumeurs. En mars 2023, par exemple, sa société Modern Construction gagne le marché de reconstruction du principal hôpital public de Kinshasa devant huit autres soumissionnaires. Cinq mois plus tard, une fakenews se propage : le gouvernement a vendu l’hôpital à l’homme d’affaires. Mais lorsque les nouveaux bâtiments de quatre étages sont inaugurés en décembre par les autorités, l’hôpital appartient toujours à l’État et aucun des médias n’avaient pris le soin de démentir.

Mais une critique malveillante ne devrait pas suffire à arrêter cet homme porté par une grande détermination et qui se projette déjà dans le futur. « Mes plans pour l’avenir incluent l’expansion mais pas uniquement à l’intérieur de la RDC. J’entends construire de bonnes infrastructures, créer des opportunités et offrir de meilleurs services à la population à travers le pays. Au cours des cinq prochaines années, je tiens à créer plus d’hôpitaux du groupe HJ, étendre l’action de la fondation, du Medical Collège et également construire HJ Garment pour créer des milliers d’emplois dans les grandes villes de la RD Congo », confiait-il au média danois MTI News en 2022.

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