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Mali : « Aucun sacrifice n’est énorme pour ce pays », Assimi Goïta

L’élite malienne, toutes tendances confondues, a jugé bon pour l’intérêt national malien de confier la « direction politique » du pays à un militaire, Assimi Goïta. Je ne pense pas que ce choix s’est imposé de gaieté de cœur, au gré de sentiments des uns et des autres, selon quoi tel individu ou tel autre valait mieux que celui — ci ou celui-là. La nature de l’adversité imposée (modus operandi compris) et l’identification de l’adversaire ont déterminé, à notre avis, le choix de la direction militaire du Mali. Pour preuve, l’étendue de la mobilisation récente à travers tout le Mali.

Assimi Goïta, et c’est comme il le déclare lui-même, ne prétend être ni « Thomas Sankara [ni] Jerry Rawlings », deux figures emblématiques de la lutte africaine à ses yeux. Le militaire affirme être lui-même : « je suis Assimi Goïta ». Ce qui frappe, dans son cas, est le degré de complicité personnelle entre la charge que la société initiée et initiatique malienne lui a confié, attend de lui et lui-même : « J’ai fait ce que je croyais juste pour mon pays. Je l’ai fait pour moi, mais je l’ai fait aussi pour vous ». La seule promesse faite à son peuple est celle d’internaliser le fait que « La mort ne m’effraie pas, [lui]. Je l’ai côtoyé au quotidien […] Je suis l’homme qui sourit avec la mort chaque jour, le poignet fermé […] ». Ainsi, son dernier vœu s’exprime de la manière suivante : Ne faites pas de ma tombe un sanctuaire. On peut se demander pourquoi ? Sa réponse est aussi plus limpide que l’eau de la source : « Aucun sacrifice n’est énorme pour ce pays ».

Il y a des jours comme cela où l’envie de vivre se démultiplie. La passion d’achever un combat amorcé vous surprend dans un lieu lointain sur la route soit en train de lire, la tête plongée dans le livre. Des propos de Goïta révèlent un caractère. Ils inscrivent l’homme dans son époque, celui d’un monde mutant. Du nord au sud, de l’ouest à l’est, l’Afrique entière se lance dans le défi de sa libération. Goïta fait mal aux réactionnaires de la « bien-pensance » africaine, à tous les chiens de garde recrutés et formés pour assurer la promotion et la défense de l’exceptionnalisme autrui, l’UNIQUE orthodoxie EN-COURS DE VALIDITÉ. Or, le fait « libérateur » exige des esprits et non seulement des êtres qui se contentent du fait ontologique : sang et corps.

La conscience de la réalité malienne « nous » ramène à « notre » éternelle préoccupation : donner une âme à un peuple. Bien que, pour quelques-uns, cette âme demeure bien vivante dans ce peuple. Au fond, la question existentielle d’une âme pour un peuple ne pose de problèmes. À l’inverse, sa manifestation sous forme de « conscience collective » résulte d’un travail laborieux. Et, c’est dans ce cadre que nous situons les propos du colonel malien Assimi Goïta. Pour nous, c’est une manière d’affirmer que le devenir d’un peuple se forge à travers des actes empreints d’histoire. Le « pouvoir vrai » ne divise ni n’oppose des populations, mais il est fondateur de ce qui devient « nation » par ses actes.

Le cas du Mali démontre suffisamment que dans un processus libérateur et de libération, le choix d’une direction est plus important que la marche à suivre. La proclamation de foi de Goïta, « aucun sacrifice n’est énorme pour ce pays », dessine de nouvelles perspectives de lutte pour le continent noir.

La vie et la mort sont les deux faces d’une même réalité : l’homme. Si la mort est inquiétante, autant la vie devrait l’être. Parce que la peur de l’avènement de la mort est le fondement de toute compromission. Elle est la source du compromis que les « dominés » trouvent avec une existence au rabais.

Qu’est-ce qui reste à faire au Mali pour que la voix du Mali soit entendue ? Les Vietnamiens sous la houlette du Vieux Hô Chi Minh ont militarisé l’ensemble de la population vietnamienne. L’Adversaire identifié ne savait distinguer le civil vietnamien du militaire. Vieux, vieille, femme et enfant, chien, chat, bœuf et vache, tout était synonyme de menace surtout quand le moment de grande recolonisation s’annonce contre l’Afrique. Il arrive un moment où le narratif de combat s’adapte à la nature de l’adversité. Étant donné que l’Occident, par sa nature, ne lâchera prise que si le prix à payer, pour lui, dépasse la proportionnalité.

Que vive à jamais le Mali et son peuple ! Salutations du Congo au peuple malien

Mufoncol Tshiyoyo



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