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Dans le viseur de la justice, les destins croisés des opposants sénégalais Ousmane Sonko et tchadien Yaya Dillo

En ces temps qui courent, les opposants sénégalais, Ousmane Sonko et tchadien, Yaya Dillo Djerou Betchi semblent bien partager quelque chose en commun : ils sont poursuivis, chacun en ce qui le concerne, par la justice dans leur pays respectif. Mais pourquoi et de quelle manière… 

Au Tchad, il a fallu que Yaya Dillo Djerou Betchi déclare sa candidature et qu’il soit soutenu par une vingtaine de partis, tous de l’opposition, pour que la justice se mette à ses trousses. La justice tchadienne, visiblement sous les ordres du Maréchal Déby, n’a mieux fait que de remettre au goût du jour une plainte déposée le 11 mai 2020 auprès du parquet d'instance de N'Djamena suivi d’un mandat d’amener de l’opposant tchadien en date du 8 octobre 2020.

«Le mandat n'étant jamais exécuté puisque se trouvant dans une zone difficile d'accès, il a fallu attendre son retour à N'Djamena où le samedi 27 février 2021, les éléments de la sécurité sont allés exécuter le mandat», explique Youssouf Tom le procureur de la République. Résultats: échanges de tirs qui ont causé des morts, des blessés et des dégâts matériels, selon le constat de la police judiciaire. 

Au Sénégal, Ousmane Sonko, farouche opposant de Macky Sall ne dort presque plus sur ses deux oreilles. Englué dans une affaire de mœurs, le leader de Pastef, à beau clamer un complot politique orchestré par le camp du pouvoir, devra répondre, bon gré malgré, à la justice.

En fait, arrivé troisième sur cinq candidats lors de la dernière élection présidentielle, il est considéré pour bien des partisans du chef de l’Etat comme un empêcheur de tourner en rond. Il est, en quelque sorte, dans la ligne de mire des gouvernants qui entendent, comme se défend Macky Sall, le «réduire à sa plus simple expression», un néant politique. Dans l’un ou l’autre cas, c’est l’indépendance et la crédibilité de la justice qui entrent en jeu. 

Ousmane Sonko comme Yaya Dillo ne devraient absolument pas se soustraire à la justice, si ce que l’on leur reproche tient la route. Mais, c’est la manière de mener les choses et les hommes à la tête des institutions qui divisent. Pour la plupart des cas, ceux qui dirigent ces institutions apparaissent plus forts que les institutions elles-mêmes, alors que c’est le contraire qui devait être, comme l’a souligné l’ancien président américain, Barack Obama : «L'Afrique n'a pas besoin d'hommes forts, mais de fortes institutions».

C’est seulement ça qui va garantir l’état de droit et la démocratie en Afrique. Mais, Idriss Déby qui veut vaille que vaille rempiler pour un sixième mandat ferme les yeux devant ces principes. Il voit en Yaya Dillo Djerou un sérieux concurrent, capable de lui voler son juteux fromage pour lequel, il semble être prêt à ligoter toute personne qui tenterait de lui empêcher d’en savourer.

N’en parlons surtout pas du Sénégal. Macky Sall qui a pêché Idrissa Seck des eaux de l’opposition pour en faire son président du Conseil économique, social et environnemental serait dans une logique de baliser le terrain pour un potentiel troisième mandat en 2024. Ce qui est clair, il est extrêmement très difficile de démêler le couscous du sable.

Baba Mballo
Correspondant Sénégal



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