Politique


Manifestations

Algérie: les étudiants à leur tour mobilisés en masse contre le candidat Bouteflika

Les étudiants algériens se sont à leur tour mobilisés en masse mardi dans tout le pays contre la perspective d'un 5e mandat du président Abdelaziz Bouteflika, le pouvoir affichant de son côté sa détermination à mener à bien cette candidature malgré la contestation. En annonçant le 10 février sa décision de briguer un 5e mandat, le chef de l'Etat, au pouvoir depuis 1999 et qui souffre des séquelles d'un accident vasculaire cérébral (AVC) depuis 2013, a mis fin à de longs mois d'incertitude. Mais il a aussi déclenché une contestation inédite depuis des années, de par son envergure nationale, sa mobilisation et ses slogans le visant directement lui et son entourage. Après les manifestations de masse de vendredi, puis de nouveaux cortèges de moindre ampleur dimanche et lundi, les étudiants ont pris le relais mardi, avec une multiplication des rassemblements à Alger, mais aussi dans la plupart des grandes villes du pays. En matinée, dans la capitale, environ 500 étudiants se sont regroupés dans la faculté centrale, doyenne des universités en plein centre d'Alger, aux cris de "Non au 5e mandat!", "Bouteflika dégage!", "Algérie libre et démocratique". Les vigiles ont alors cadenassé les grilles pour les empêcher de sortir, ont constaté des journalistes de l'AFP. "Policiers et étudiants sont des frères", ont aussi crié ces étudiants aux forces de l'ordre, déployées en nombre dans la rue. - Des milliers à Alger - Dans plusieurs facultés d'Alger, "Pour éviter la confrontation avec la police" les étudiants avait décidé de rester dans l'enceinte universitaire, où les policiers "n'ont pas le droit d'entrer", a expliqué à l'AFP Raouf, étudiant en master de journalisme. Environ 500 étudiants d'un institut de journalisme d'Alger se sont eux réunis sur leur campus et quelques centaines d'autres à l'extérieur, selon une journaliste locale sur place. Des groupes d'étudiants d'autres campus algérois ont défilé dans plusieurs quartiers de la capitale avant de se rejoindre jusqu'à former un cortège de plusieurs milliers de personnes, en plein centre-ville, selon une journaliste de l'AFP. Comme vendredi, la police est restée largement passive, se contentant de canaliser les cortèges. Des policiers ont brièvement usage de gaz lacrymogènes après avoir essuyé quelques jets de pierre, selon une journaliste de l'AFP. Les manifestants, soutenus par les riverains qui leur offraient des bouteilles d'eau, se sont dispersés dans le calme en fin d'après-midi. D'autres rassemblements ont été rapportés par des médias locaux ou sur les réseaux sociaux dans l'agglomération algéroise. Hors de la capitale, de multiples manifestations ont été évoquées, via notamment le hashtag "Non au 5e mandat" sur les réseaux sociaux, sans qu'il soit possible de déterminer précisément leur nombre et leur ampleur. Le site d'information TSA (Tout sur l'Algérie) a fait état de défilés, sur des campus ou dans les rues de Constantine, Béjaïa et Tizi-Ouzou, à l'est d'Alger), Sétif et Guelma, au sud-est de la capitale, ou encore à Ouargla, dans l'est du pays. A Oran, deuxième ville d'Algérie, ils étaient "un millier ou plus" sur le campus de l'Université Oran 2, a dit Hamza, étudiant qui a lui-même fini par se joindre aux protestataires. "Je partage la même cause", a-t-il expliqué à l'AFP, "on veut que tout le système actuel parte, pas seulement le président". "L'Algérie a eu et a toujours du potentiel et des moyens pour réussir", a-t-il poursuivi, dénonçant un petit groupe qui s'accapare le pouvoir. - "Pas en mon nom" - A Annaba (400 km à l'est d'Alger), 2.000 à 3.000 personnes au total ont défilé là aussi sans incidents, majoritairement sur les divers campus --pour ne pas prendre le risque d'être arrêtés, "ce qui pourrait dissuader les gens de se mobiliser vendredi"--, a rapporté à l'AFP un journaliste d'un média local. "Pas en mon nom!", était l'un des mots d'ordre de la contestation de mardi, lancée sur les réseaux sociaux après le soutien affiché par 11 associations estudiantines à la candidature de M. Bouteflika. "Nous organisons une démonstration de force afin de montrer que ces 11 associations n'ont pas parlé en notre nom", a expliqué à l'AFP Hakim, 23 ans, étudiant en génie civil à l'université des sciences et technologie de Bab Ezzouar (USTHB), à quelques km du centre d'Alger. Des enseignants et universitaires avaient appelé leurs collègues à se joindre aux étudiants. Face au mouvement, le directeur de campagne de M. Bouteflika, Abdelmalek Sellal, a annoncé que le dossier de candidature du président sortant serait déposé le 3 mars, la date butoir. Comme le Premier ministre Ahmed Ouyahia la veille, il a fait valoir que le choix devait se faire dans les urnes. M. Ouyahia avait également mis en garde "contre les risques de dérapages sérieux", alors que plusieurs membres du camp présidentiel ont agité ces derniers jours le spectre de la "décennie noire" de guerre civile en Algérie (1992-2002), à laquelle M. Bouteflika est largement crédité d'avoir mis fin. M. Bouteflika, qui n'apparaît que très rarement en public depuis son AVC, se trouverait actuellement en Suisse pour des "examens médicaux". Plusieurs étudiants rencontrés par l'AFP lundi avaient résumé leur état d'esprit, soulignant n'avoir "connu que M. Bouteflika comme président". En Algérie, selon des données de la Banque mondiale, plus d'un tiers de la population (soit 15 millions) a moins de 20 ans, une frange de la population massivement au chômage. Avec AFP


Politique