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Mali: vers un pouvoir absolu du Président de la Transition, Assimi Goïta  

Le Mali, sous le régime de la junte menée par le président Assimi Goïta, se dirige de plus en plus vers une dictature. Les actes que pose le gouvernement malien militent en ce sens. 

Le gouvernement de transition du Mali a suspendu toutes les activités politiques, a indiqué le communiqué du conseil des ministres tenu le 10 avril. «Sont suspendues jusqu’à nouvel ordre, pour raisons d’ordre public, les activités des partis politiques et les activités à caractère politique des associations sur toute l’étendue du territoire national», a déclaré, mercredi, à la télévision nationale Abdoulaye Maiga, porte-parole du gouvernement.   

Les autorités maliennes ont justifié leur décision par un besoin de maintenir l’ordre public comme étant la principale raison de la suspension des activités des partis politiques. EIles clament que, malgré leurs efforts à réguler l’activité politique, «les actions de subversion des partis politiques et de leurs alliés ne font que se multiplier». 

Eteindre toute voix discordante

Dans la foulée de cette décision du gouvernement malien de suspendre les activités politiques, la Haute autorité de la communication du Mali (HAC) a demandé, jeudi, dans un communiqué, aux médias d’«arrêter toute diffusion et publication des activités des partis politiques et des activités à caractère politique des associations». La HAC qui est sous la coupole de la junte, ne peut pas ramer à contre sens de la volonté de Assimi Goïta.

Dans un communiqué, la Maison de la presse du Mali (MP) a dénoncé la demande d'interdire la couverture d’activités politiques. Elle «rejette purement et simplement» le communiqué de la HAC qu’elle estime être «sans fondement juridique». «La Maison de la Presse appelle l’ensemble de la presse malienne à ne pas se soumettre aux injonctions de la HAC et invite les médias à rester debout, unis et mobilisés pour la défense du droit du citoyen à l’information», précise-t-elle dans son communiqué. Le risque du chaos est grand.

Il y a des précédents

Donc, ce n’est pas trop de dire que le Mali se dirige vers une dictature. De nombreux actes posés par le président Goïta et son gouvernement en disent long sur cette intention des actuelles autorités maliennes à se maintenir davantage à la tête du pays et d’écarter toute voix discordante. En tout cas, le guide religieux, à savoir Imam Mahmoud Dicko, fer de lance du mouvement ayant contribué à la chute du régime de l’ancien chef de l’Etat malien, Ibrahima Boubacar Keïta, ne doit pas être surpris par la tenue dictatoriale qu’a enfilée le président Assimi Goïta. 

En mars dernier, la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l'Imam Mahmoud Dicko a été dissoute par la junte. Cette dernière lui reprochait de s’être transformée «en un véritable organe politique de déstabilisation et de menace pour la sécurité publique».

Imam Dicko était un fervent soutien de la junte. Mais, il a pris ses distances, demandant à ce que les militaires rendent le pouvoir aux civils à la suite de l’élection présidentielle qui était prévue en février dernier.

D’autres activistes très critiques de la junte ont été aussi envoyés en prison. Parmi eux, il y a Ras Bath, célèbre animateur de radio-télévision au Mali, qui avait déclaré qu'un ex-Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maïga mort en détention sous la junte, avait été «assassiné». On peut citer également le colonel Yaya Sangharé qui a été mis en prison après avoir publié un livre de 400 pages dont certains passages portent de «prétendues» incriminations graves de violation des droits de l’homme par les Forces armées maliennes. Le gouvernement malien a suspendu la diffusion des programmes de nombreux médias, surtout ceux internationaux. Des journalites ont été menacés ou arrêtés dans le cadre de l’exercice de leur métier. 

Maitre absolu de Koulouba

Depuis plusieurs années, le Mali vit dans l’instabilité due à la guerre menée contre des insurgés islamistes. Le pays a vécu des coups d'État en août 2020 et en mai 2021. L’actuel président, Assimi Goïta, a dirigé le deuxième coup contre Bah N’Daw qui a assumé le pouvoir après que Ibrahima Boubacar Keïta a été renversé.  Confronté à une vague de violences des groupes djihadistes, le gouvernement malien a demandé le retrait des forces armées françaises et des Nations-unies. Les derniers soldats français sont partis en 2022, et la mission de l’Onu au Mali est partie en décembre 2023. La junte a amené des soldats contractuels du groupe russe Wagner en 2021 pour l’aider à lutter contre le terrorisme.

Aujourd’hui, plus que de combatte le terrorisme pour justifier l’inorganisation d’une élection présidentielle pour transmettre le pouvoir aux civils, le Président Assimi Goïta est en train de régner en maire absolu à la tête du Mali. 

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