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Jeûne mortel au Kenya: 191 cas d' »assassinats » retenus contre le pasteur Paul Nthenge Mackenzie

Le pasteur Paul Nthenge Mackenzie, déjà poursuivi pour "terrorisme", "torture" et "cruauté" sur enfants ainsi qu'"homicides involontaires", sera également jugé pour l"assassinat" de 191 adeptes de sa secte évangélique, a annoncé mardi un tribunal du sud-est du Kenya.

Un total de 429 corps ont été retrouvés dans la forêt de Shakahola, où il prêchait de jeûner jusqu'à la mort pour "rencontrer Jésus" avant la fin du monde qu'il annonçait pour août 2023.

Le pasteur autoproclamé et 29 autres accusés ont plaidé non coupable des accusations d'"assassinat", a constaté un journaliste de l'AFP lors de leur comparution devant un tribunal de la ville de Malindi, dix mois après la révélation de cette affaire qui a choqué le Kenya, pays religieux majoritairement chrétien d'Afrique de l'Est.

Une personne a par ailleurs été jugée mentalement inapte à être poursuivie, après des expertises psychiatriques.

Paul Nthenge Mackenzie avait déjà plaidé non coupable des précédentes poursuites engagées contre lui, notamment celles de "facilitation de la commission d'un acte terroriste", "possession d'un article en lien avec une infraction à la loi sur la prévention du terrorisme", "participation à une activité criminelle organisée" et "radicalisation" formellement prononcées le 18 janvier, celles d'"homicide involontaire" le 23 janvier et celles de "torture" et "cruauté" sur enfants le 25 janvier.

Sur les 429 décès recensés, 191 cas relèvent d'accusations d'"assassinat" et 238 d'"homicide involontaire".

Cet ancien chauffeur de taxi devenu pasteur est en détention depuis le 14 avril, au lendemain de la découverte des premières victimes dans la forêt de Shakahola.

Les quatre volets de l'accusation (terrorisme, crimes sur enfants, meurtres, homicides involontaires) ont été divisés entre quatre tribunaux, trois à Mombasa et un dans la ville de Malindi. Il n'est pour l'instant pas connu si l'affaire donnera lieu à un seul procès ou à quatre.

"Défaillances"

Les recherches menées depuis avril 2023 à Shakahola, vaste zone de "bush" de la côte kényane, ont permis d'exhumer 429 corps, certains enterrés depuis plusieurs années.

Les autopsies ont révélé que la majorité des victimes sont mortes de faim. Certaines, dont des enfants, ont été étranglées, battues ou étouffées.

La révélation de ce scandale, baptisé "massacre de Shakahola", a placé les autorités kényanes sous le feu des critiques pour ne pas avoir empêché les agissements du pasteur, pourtant arrêté à plusieurs reprises pour ses prêches extrêmes.

Dans un rapport publié en octobre, une commission sénatoriale a pointé des "défaillances" de la justice et de la police, alertées en 2017 et 2019.

En juillet, le ministre de l'Intérieur Kithure Kindiki a estimé que "le massacre de Shakahola (était) la pire faille de sécurité de l'histoire" du Kenya, promettant de "faire pression sans relâche pour des réformes légales afin de dompter les prédicateurs voyous".

L'affaire a ravivé le débat sur l'encadrement des cultes au Kenya.

Le président William Ruto, lui-même un fervent protestant soutenu par les milieux évangéliques lors de son élection en août 2022, a créé un groupe de travail chargé de "l'examen du cadre légal et réglementaire régissant les organisations religieuses".

Mais les précédentes tentatives de réglementation se sont heurtées à une vive opposition, au nom notamment de la liberté de culte.

Le gouvernement a annoncé que la forêt de Shakahola serait transformée en "lieu de mémoire", "afin que les Kényans et le monde n'oublient pas ce qui s'est passé".



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