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Sécurité en Afrique : Quand l’ONU et l’Union africaine unissent leurs forces

La scène politique africaine est marquée par des défis profonds en matière de sécurité et de développement. Du Sahel à la Corne de l’Afrique, des crises complexes et interdépendantes menacent la stabilité de plusieurs régions. Face à ces défis, l’amélioration de la coopération entre l’Union africaine (UA) et l’Organisation des Nations unies (ONU) s’impose comme un levier stratégique pour renforcer la paix et la sécurité sur le continent. Alors que les enjeux se multiplient, cette collaboration accrue entre les deux institutions devient essentielle non seulement pour répondre aux urgences immédiates, mais aussi pour soutenir le développement durable à long terme.

Une dynamique de collaboration en constante évolution

La coopération entre l’Union africaine et l’ONU ne date pas d’hier. Toutefois, face à l'intensification des conflits dans des régions clés comme le Sahel, cette relation a pris une importance renouvelée. En 2017, les deux organisations ont signé un cadre conjoint pour renforcer leur partenariat en matière de paix et de sécurité, ce qui a permis une meilleure coordination des opérations de maintien de la paix et des missions politiques. Depuis lors, des progrès ont été réalisés, mais des défis subsistent.

Lors d’une session du Conseil de sécurité de l’ONU en septembre 2023, le Secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a réaffirmé l’importance de cette alliance. "Le partenariat entre l’ONU et l’Union africaine est fondamental pour la paix et la sécurité en Afrique. Nous devons intensifier notre collaboration et agir de concert pour soutenir les populations touchées par les conflits", a-t-il déclaré, mettant en lumière la nécessité d’un engagement plus fort et plus structuré dans des zones sensibles comme le Sahel, où les groupes armés et les réseaux terroristes prospèrent sur fond d’instabilité chronique.

L’Afrique face à des défis sécuritaires complexes

Le Sahel est un épicentre de l’insécurité en Afrique. Selon des données de l’ONU, plus de 29 millions de personnes dans cette région ont besoin d'une assistance humanitaire en 2023, un chiffre qui ne cesse d’augmenter en raison des conflits armés et des effets du changement climatique. L’Union africaine, par l’intermédiaire de sa Force conjointe du G5 Sahel (composée du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad), joue un rôle clé dans la lutte contre le terrorisme dans cette zone. Cependant, sans le soutien financier et logistique de l’ONU et d’autres partenaires internationaux, ces efforts risquent de s’essouffler.

Le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a souvent souligné la nécessité d’une plus grande coopération internationale pour lutter contre le terrorisme en Afrique. "L’Afrique ne peut pas affronter seule ces menaces transnationales. La coopération avec l’ONU est essentielle pour que nos efforts soient coordonnés et efficaces", a-t-il affirmé lors d’une réunion en marge de l’Assemblée générale des Nations unies en 2023.

Au-delà du Sahel, d’autres régions telles que la Corne de l’Afrique ou encore la région des Grands Lacs sont également en proie à des conflits qui affectent la stabilité du continent. La crise en Éthiopie, par exemple, avec le conflit dans la région du Tigré, a attiré l’attention internationale et mis en lumière les limites de la capacité des institutions régionales à gérer des crises internes complexes. Dans ces situations, la coopération entre l’UA et l’ONU permet de mieux coordonner l'aide humanitaire, le dialogue politique et les initiatives de reconstruction.

Des enjeux financiers et logistiques

Malgré la volonté affichée par les deux organisations, le financement des opérations de paix en Afrique reste un sujet délicat. Selon un rapport de l'Institut d'études de sécurité (ISS), en 2022, l’UA a rencontré des difficultés à mobiliser des fonds suffisants pour soutenir ses missions de maintien de la paix. Environ 80 % du financement de ces opérations proviennent de partenaires internationaux, en particulier l’ONU et l’Union européenne. Cette dépendance pose la question de la durabilité des missions africaines de maintien de la paix.

António Guterres a appelé à plusieurs reprises à une augmentation des financements alloués aux missions de paix en Afrique. Lors d'une session du Conseil de sécurité en mai 2023, il a exhorté les États membres de l’ONU à soutenir financièrement l’Union africaine. "Les missions africaines ont prouvé leur capacité à stabiliser les régions en conflit. Mais elles ont besoin de ressources prévisibles et pérennes pour être efficaces", a-t-il déclaré.

En 2021, l’Union africaine a lancé l’initiative "Silencing the Guns", avec pour objectif de mettre fin aux conflits sur le continent d’ici 2030. Cependant, selon un rapport de la Banque africaine de développement (BAD), les conflits en Afrique coûtent environ 15 % du PIB continental chaque année, freinant les efforts de développement. Ainsi, pour espérer réussir cette initiative, il faudra une coopération internationale renforcée, avec des investissements plus substantiels dans la sécurité et le développement.

Les populations africaines au cœur des préoccupations

Si les grandes institutions comme l’UA et l’ONU jouent un rôle clé dans le maintien de la paix, il est crucial de ne pas perdre de vue les aspirations des populations locales. Sur le terrain, de nombreuses voix s’élèvent pour réclamer une meilleure prise en compte des besoins des citoyens dans la planification des missions de paix. Des organisations de la société civile, comme le Réseau ouest-africain pour l’édification de la paix (WANEP), appellent à une plus grande inclusion des communautés locales dans les processus de médiation et de résolution des conflits.

Fatoumata Diarra, activiste malienne et membre du WANEP, explique : "Les solutions aux conflits doivent venir des communautés elles-mêmes. Les populations locales doivent être impliquées dans les processus de paix, car ce sont elles qui vivent les réalités sur le terrain." Ces paroles soulignent la nécessité d’adopter une approche plus participative dans les efforts de maintien de la paix, en tenant compte des dynamiques locales et des besoins spécifiques des populations.

Perspectives pour l’avenir

Le renforcement de la coopération entre l’Union africaine et l’ONU est sans aucun doute une étape cruciale pour relever les défis sécuritaires en Afrique. Toutefois, pour que cette collaboration soit véritablement efficace, elle doit être soutenue par un engagement financier solide, une coordination accrue et une plus grande inclusion des populations locales.

À l’horizon 2030, les objectifs de développement durable des Nations unies et l’initiative "Silencing the Guns" de l’Union africaine tracent une voie ambitieuse pour un continent plus stable et prospère. Pour y parvenir, l’engagement des acteurs internationaux et africains sera essentiel, tout comme la voix des populations africaines, qui doivent rester au cœur des stratégies de paix et de développement.

Dans ce contexte, les opportunités d’investissement en Afrique restent prometteuses. Avec un continent jeune, riche en ressources et en croissance rapide, la stabilité régionale, soutenue par des partenariats internationaux solides, ouvrira la voie à de nouvelles opportunités pour les Africains de la diaspora et les investisseurs étrangers souhaitant participer au développement du continent.

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